« J'ai les yeux ouverts ». Le dernier mot d’Alla Gutnikova au Tribunal Dorogomilovsky de Moscou
Journaliste au magazine russe Doxa, Alla Gutnikova a été arrêtée en avril 2021 et placée aux arrêt domiciliaires pendant plus d'un an, avant d'être condamnée à deux années de "travail correctionnel", pour avoir posté sur YouTube une vidéo de 3 minutes dénonçant la répression subie par des étudiants pour avoir manifesté en soutien à l'opposant au régime Alexeï Navalny
Le 12 avril dernier, un tribunal de Moscou a condamné à deux ans de « travaux collectifs » Alla Gutnikova et trois autres jeunes gens rédacteurs du magazine « Doxa », emblématique des résistances de la jeunesse russe au régime de Vladimir Poutine. Les quatre condamnés venaient de passer un an aux arrêts domiciliaires, avec interdiction d'accéder à internet. Le 14 avril 2021, la police russe avait fait irruption dans les locaux de Doxa, puis chez chacun des prévenus, pour saisir leurs ordinateurs et leurs téléphones. Le crime ? Les quatre prévenus auraient « encouragé des mineurs à prendre part à des manifestations anti-gouvernementales » en postant sur YouTube une courte vidéo de soutien à des étudiants inquiétés pour leur opposition au Kremlin.
Les accusations avancées contre les journalistes de Doxa sont dénuées de tout fondement. La persécution judiciaire qu'ils subissent, parfaitement arbitraire, visent simplement à l'intimidation et à la dissuasion des mouvement d'opposition au sein de la jeunesse russe, comme l'expliquait récemment Alla Gutnikova dans un entretien pour L'Express. Près de 300 intellectuels, dont les philosophes Etienne Balibar, Judith Butler et Slavoj Žižek, ont signé une tribune internationale de soutien.
Le 8 avril dernier, au terme des audiences du procès, Alla Gutnikova a lu devant le tribunal une déclaration vite reprise sur les réseaux sociaux en Russie et ailleurs. Le texte a été publié en russe par Doxa et BBCNews avant d'être traduit et diffusé en allemand, en anglais, en italien, en hébreu, en polonais, en roumain, en tchèque et en croate. Le Média est heureux de publier la traduction française que lui a proposée Alla Gutnikova.
Je ne parlerai pas de l'affaire, de la perquisition, des interrogatoires, des volumes du dossier, des procès. C'est ennuyeux et inutile. Ces derniers mois, j'ai fréquenté l'école de la fatigue et de la frustration. Mais avant l'arrestation, j'ai réussi à m'inscrire dans une école qui enseigne à parler de choses vraiment importantes.
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