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Henri Sterdyniak, signataire du manifeste des économistes atterrés, dissèque les choix économiques des gouvernants, débusque la propagande néolibérale et dévoile la logique prédatrice des multinationales.

Les mensonges sur les dépenses publiques

Comme tant d’autres avant lui, Emmanuel Macron souhaite réduire les dépenses publiques. Elles garantissent pourtant un singulier modèle français de service public . A quoi servent- elles ? Pourquoi faut-il les défendre ? Éléments de réponse avec l’économiste atterré Henri Sterdyniak, dans ce nouvel épisode de la Chronique Éco.

En France, les dépenses publiques représentent 56,5% du PIB. Le patronat, l’oligarchie, les économistes libéraux, les journalistes économiques nous serinent tous le même discours : les dépenses publiques sont trop élevées ; elles tuent l’activité privée qui n’est plus que 43,5% du PIB. La priorité de tout gouvernement doit être de réduire ces dépenses publiques. Sarkozy, Hollande, Macron, tous ont essayé, aucun n’a réussi à baisser fortement le montant des dépenses publiques. L’explication de cette résistance est simple : les dépenses publiques sont utiles ; les Français y sont attachés.

Il faut d’abord dénoncer une erreur ou une manipulation. Les dépenses publiques ne sont pas une composante du PIB ; il ne reste pas 43,5% du PIB pour la production ou la consommation privée. Au contraire, les dépenses publiques financent les dépenses des ménages et la production du secteur privé.

Des 56,5 points de dépenses publiques, 20 points sont des prestations sociales versées aux ménages, les prestations familiales, les retraites, les allocations chômage, les indemnités maladie, les minimas sociaux. Ces prestations sont dépensées par les ménages. Ainsi, quand une famille achète des fournitures scolaires, quand un retraité fait ses courses, quand une personne paie son médecin, ceci est financé par des dépenses publiques ; cela génère de l’activité privée. La France dépense plus en prestations sociales que les pays voisins, c’est un choix social qui fait que notre taux de pauvreté est relativement bas. Il faudrait augmenter et non diminuer ces dépenses : 20% des enfants vivent encore dans la pauvreté ; les prestations familiales et le RSA sont beaucoup trop faibles.

17,5 points de PIB sont des dépenses collectives qui profitent directement aux ménages : essentiellement des dépenses d’éducation et de santé. Là aussi, il faudrait dépenser plus pour un service public de garde des très jeunes enfants ; pour augmenter les effectifs et les salaires des personnels des établissements pour personnes âgées dépendantes.

La production publique ne représente que 16,5% du PIB, essentiellement donc dans la santé et l’enseignement. Contrairement à ce que prétend le patronat, les enseignants ou le personnel soignant ne vivent pas au détriment du secteur privé. Leur activité est productive et plus utile socialement que bien des emplois du privé. Les enseignantes, les infirmières, les aides-soignantes sont plus utiles que les publicitaires, les spéculateurs financiers ou les conseillers fiscaux, même si leurs revenus sont beaucoup plus faibles. Dans de nombreux domaines, la production publique est plus efficace, plus égalitaire, moins coûteuse que la production privée. Il n’y a pas d’actionnaires à rémunérer. Sans la Sécurité sociale, chacun devrait souscrire une assurance maladie privée, d’autant plus coûteuse qu’il est en mauvaise santé ou qu’il a des enfants. La privatisation est souvent un gaspillage coûteux, pensez aux profits des sociétés d’autoroutes ou aux dépenses de fonctionnement des complémentaires santé. Faut-il laisser le capital privé chercher à faire du profit dans les cliniques, les crèches, les maisons de retraite en augmentant les tarifs, en sélectionnant les usagers, en dégradant la qualité du service et le statut du personnel ?

Les dépenses publiques d’investissements ne représentent que 2% du PIB. Là aussi, il faudrait dépenser plus pour la transition écologique, pour construire et rénover des logements, pour les transports collectifs. Certes, les dépenses publiques doivent être gérés avec rigueur. La France dépense 5 points de PIB en aides aux entreprises avec, en particulier, les réductions de cotisations sociales, le crédit impôt recherche, ; ces aides sont versées sans engagement de la part des entreprises et sans contrôle. Certaines pourraient et devraient être réduites.

Les dépenses de fonctionnement ne représentent que 6 points de PIB, le même niveau que dans les pays voisins. Mais le service public subit la contagion du privé ; selon la grille de la fonction publique, les salaires des fonctionnaires ne devraient pas dépasser 7000 euros par mois, mais beaucoup de hauts fonctionnaires au ministère des finances, à la Cour des Comptes, dans les agences indépendantes s’octroient des salaires supérieurs à 15 000 euros par mois. Un plafonnement serait nécessaire.

Emmanuel Macron s’est donné l’objectif de baisser de 120 000 le nombre d'emplois dans la fonction publique. Drôle d’ambition, quand il manque 3 millions d’emplois, que les besoins sont criants dans les services publics de proximité, la garde des jeunes enfants, les maisons de retraite, l’éducation supérieure et … le contrôle fiscal.

Le président veut baisser les dépenses publiques de 70 milliards d’euros, Cette baisse toucherait essentiellement des dépenses sociales, les retraites, les prestations familiales, des allocations chômage et les allocations logement, au détriment de l’emploi et de la cohésion sociale. Oui, il faut défendre des dépenses publiques.

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Henri Sterdyniak, signataire du manifeste des économistes atterrés, dissèque les choix économiques des gouvernants, débusque la propagande néolibérale et dévoile la logique prédatrice des multinationales.

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