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Assigné à résistance - Bas les masques

Par Denis Robert

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Les galères du télétravail, les grosses ficelles du discours présidentiel, Albert Camus et le drame des Ehpad : le sixième épisode du carnet de bord de Denis Robert, confiné près de Metz.

Je sature un peu, je fatigue aussi. J’ai été un peu malade - un peu de fièvre, de la toux. Trois jours entre deux eaux à me la jouer Corona sous couette à Châtel (Grand Est, cœur de l’épidémie).

Vous avez remarqué que je répète « un peu ». C’est mauvais signe. Je recommence.

Ici, ça caille et j’ai pris froid parce que je me suis posé en tee-shirt, la nuit de dimanche à lundi, sur un fauteuil en extérieur alors que le thermomètre était tombé en dessous de zéro (mais tout le monde s’en fout).

J’ai décidé, pour ce sixième épisode du feuilleton entamé voici 32 jours, de tout écrire en temps réel. Je suis en retard sur ma livraison et Téo, qui regarde les étoiles dans les Landes (et ressemble à Felix Gallardo, alias Diego Luna), attend mes pages pour les éditer. Je les lui avais promises pour hier. Mais une réunion de rédaction a mangé mon moral et ma journée.

Le télétravail à 15, c'est très compliqué...

Ça, ce sont les livres que je dois lire et que je n’ai pas encore eu le temps d’ouvrir sauf celui de Camille, qui a écrit un roman à clé sur… le Média. 

Assigné à résistance - Bas les masques

Je tourne en rond, je sais. Vous voyez, il est en tête de ma pile.

Le Média, qui n’a d'ailleurs rien à voir avec la France Insoumise. Je suis étonné d’avoir à le répéter encore si souvent.

Il est 8 heures, nous sommes le jeudi 16 avril 2020 et je reprends le fil de mes fumeuses pensées.

J’ai des dizaines de vidéos et d’articles en réserve. J’aurais dû écrire plus tôt mais j’attendais l’allocution d’Emmanuel Macron pour démarrer. Je pensais à un effet starter. Son solo d’une trentaine de minutes m’a laissé groggy. Même trois jours après.

J’ai pensé à un film de John Woo en le regardant avec sa nouvelle peau orange. Volte/Face. Vous savez, cette scène où Nicolas Cage et John Travolta changent de visage. Je trouve que Macron se trumpise tous les jours un peu plus. Et j’imagine la même scène entre le président français et son homologue US.

J’aimerais avoir confiance en ses mots, en sa bonne mine, en ses sourires, en ses lyriques envolées, mais le charme est rompu. Même quand il dit qu’il a eu des ratés ou que lui le premier va changer, je sens l’enfumage.

Emmanuel Macron est fascinant. Cette façon qu’il a de toujours retomber sur ses pieds. Il est comme un chat qui chute d’un arbre ou d’un CHU de dix étages. On se dit que ce con de chat va s’écraser. On ferme les yeux. Et le chat repart en dandinant du cul comme si les lois de l’apesanteur n’étaient pas les mêmes pour lui et pour nous.

On pourra refaire son histoire quand il ne sera plus au pouvoir. Un jour fatalement, la supercherie sera visible par tous. Un jour, fatalement le roi sera nu. 

Assigné à résistance - Bas les masques

On retiendra quoi alors ? On retiendra qu’il fut un formidable communicant. Un prestidigitateur. Un type capable de dire l’inverse de tout ce qu’il a fait depuis qu’il est au pouvoir. Et d'apparaître encore crédible aux yeux des sondeurs, des journalistes de BFM et de certains électeurs.

Faut dire, la presse et les journalistes de BFM (pas les seuls, mais eux quand même) sont les champions de France de la flagornerie et de la propagande…

Mettez-les en face du Youtubeur Ramous. Et dites-vous que ces gens-là ont vu la même prestation, le même événement.

On va avoir du mal à renouer le fil…

Dans la série, il y en a deux qui auraient mieux fait de tourner plusieurs fois leur langue dans leur bouche avant de l’ouvrir. Une fois n’est pas coutume, ce ne sera ni le préfet Lallement, qui s’est tenu plutôt calme cette semaine, ni Sibeth Ndiaye…

Non, je voudrais décerner deux médailles à deux types plutôt prisés de la jet-set culturelle.

D’abord Éric Rochant, qu’on a connu plus inspiré … Le monde est sans pitié avec la connerie, Éric. Penser que Macron va nous sauver en est une grosse…. Et mettre dos à dos Le Pen et Mélenchon en est une encore plus grosse…

Ensuite, Sylvain Tesson, qui devrait retourner faire un stage en Sibérie plutôt que s’interroger sur la chance que nous avons de vivre en France. Ça lui ferait du bien :

« Il y a un an, une part du pays voulait abattre l’État. Soudain, prise de conscience : il est plus agréable de subir une crise en France que dans la Courlande orientale. L’État se révèle une Providence qui n’exige pas de dévotions. On peut lui cracher dessus, il se portera à votre secours. C’est l’héritage chrétien de la République laïque. On peut appliquer le mot de Beaumarchais à la géographie : nous nous donnons la peine de naître en France et sommes mieux lotis qu’ailleurs. Subitement, on a moins envie d’aller brûler les ronds-points, non ? ».

Je remercie Laurent Thines, le toubib, de lui répondre à ma place.

Tout cela ferait de la jolie littérature si on n’avait pas une pandémie et un confinement à gérer. Et ce président aux manettes pour nous guider dans cette épreuve. Macron ne nous parle pas, il dit la messe - sa messe. Il fait de la morale. Depuis des mois, il se trompe et nous balade : les masques, les tests, le traitement infligé à l’hôpital public. Un montage résume assez bien la situation.

Assigné à résistance - Bas les masques

Jamais Macron n’incarne un chef de guerre comme l’étaient Churchill, De Gaulle ou Mitterrand. À part nous répéter que nous sommes en guerre, qu’a-t-il dit quant à cette pandémie et aux moyens d’en sortir ? Tout et son contraire. Il a généré trouble, angoisse et colère.

On le regarde. On essaie d’intégrer les données objectives de son discours et on voit que ça ne tient pas. Ouvrir les écoles – haut lieu de propagation entre sujets asymptomatiques - le 11 mai, mais garder fermés les restaurants ou les cinémas… Comment ? Pourquoi ? Même le Conseil de l'Ordre des Médecins s'y oppose...

Et les masques ? Deux mois qu’on les attend. Pourquoi en Espagne en distribue-t-on gratuitement, et pas en France ? Pourquoi les pharmacies n’ont-elles toujours pas le droit de nous en vendre ?

Cette saga des masques qui passent d’utiles à inutiles est le signe impressionnant de la totale incompétence de Macron et de sa garde rapprochée. S’il tombe un jour, il tombera pour les morts des Ehpad. Il tombera aussi pour sa gestion calamiteuse des masques.

Pas seulement calamiteuse. Mortifère. Macron, c’est Folamour, le dictateur fou de Kubrick.

Sarkozy, Hollande ou Chirac, à sa place, auraient sûrement fait mieux pour une raison qui ne tient pas qu’à leur personnalité. Ces présidents-là étaient entourés, secondés. Ils avaient autour d’eux des hommes, des femmes, des équipes qui n’étaient pas des dévots.

Il y a ce culte de la personnalité autour de lui. Cette façon qu’a Macron de nous regarder et de se regarder. C’est un cas unique. C’est psychiatrique. Et c’est ce qui me fait sérieusement flipper depuis quelques jours.

Jusqu’alors, c’était une sorte de jeu entre lui et moi. Comme une plaisanterie qui durait.  

Heureusement que Macron est là. Sans lui, on ne gagnerait pas autant de socios. Sans lui, nos audiences ne grimperaient pas si vite.

Sauf qu'on ne joue plus.

À Paris, les cadavres s’entassent à Rungis. Certains hôpitaux louent des camions frigorifiques pour cacher les corps. À Mars-la-Tour, à dix bornes de chez moi, un Ehpad est en train d'être décimé.

J’ai été attaqué par des médecins après mon dernier édito où j’évoquais l’usage de Rivotril pour euthanasier les vieillards, les achever, ai-je écrit, comme dans le film de Sydney Pollack où on achevait bien les chevaux. 

J’aurais sans doute dû davantage insister sur le fait indéniable que le Rivotril permettait d’abréger la souffrance de malades qui mourraient d’asphyxie. Une enquête publiée par l’Obs le 8 avril dernier le montre bien. Loin de moi l’idée de minimiser la difficulté pour un médecin d’en arriver à cette extrémité, l’humanité qu’il faut pour… Loin de moi…

Mais on en est là aujourd’hui parce que des politiques, en massacrant l’hôpital public, en réduisant les budgets, en sous-payant les soignants, ont permis cette gabegie et sont à la base de cette horreur sanitaire.

Assigné à résistance - Bas les masques
Fragment de toile de Philippe Pasquet, collection DR.

Ces politiques et ces hauts fonctionnaires ont la trouille aujourd’hui. Et on comprend qu’ils aient peur... Ils craignent les procès et n’osent même plus communiquer par écrit. C’est dire. Et à la tête de l’État, on craint encore plus les représailles après le confinement

Je ne suis ni violent, ni belliqueux. Je leur demande seulement de réfléchir d’abord à la peur de ceux, par milliers, qu’on laisse crever dans les Ehpad et dans les maisons de retraite plus ou moins médicalisées [voir les témoignages (1) et (2) en fin d'article, NDLR]. Ceux-là n'entrent d'ailleurs pas dans les tableaux statistiques.

Je leur demande d’imaginer la tristesse de ceux qu’on empêche de se voir, même au bord d’une fenêtre et à qui on envoie la police… Je leur demande d’imaginer la rage et la rancœur naissante de ces enfants qui n’ont pas pu serrer leurs pères ou leurs mères dans leurs bras. Et qu’on a laissé partir seuls. La plaie est béante.

Emmanuel Macron nous fait donc la leçon depuis quatre semaines. Il navigue à vue entre le coach sportif et le curé. Il n’a pas d’idée force. Il a sans doute une vision, mais il n’a plus la capacité de l’imposer. Il est donc perdu mais n’ose pas l’avouer. 

Il nous en a fait part pendant sa campagne et surtout le jour de son élection : il est obnubilé par l’idée de laisser une trace dans l’Histoire. C’est son principal moteur. Avec les Gilets Jaunes et la réforme des retraites, il devait bien sentir qu’il allait devoir revoir son objectif à la baisse. La trace qu’il va laisser, c’est celle de pire président de la Vème République.

Je me souviens qu’un jour, avant son élection, embêté par une question qu’on lui avait posée à propos de François Hollande, et cherchant à ne pas trop l’enfoncer, il avait dit que l’ancien président, celui de qui il s’apprêtait à prendre la place, avait été « empêché ». C’est pour cela qu’il avait perdu. Il entendait par là que François Hollande n’avait pas pu mener à bien le virage libéral qu’il souhait lui et qu’il voyait comme seule issue. Hollande aurait ainsi été empêché par les vieux caciques du PS, les gauchistes, les ouvriéristes, les fainéants et les sans-grades.

Lui, Macron, ne serait empêché par rien. Les preuves : l’abrogation de l’ISF, le CICE, la réduction des APL, sa loi retraite, les tirs de LBD sur les foules de Gilets Jaunes, la casse du mouvement social et des syndicats. Lui ne serait pas mou comme Hollande. Il avait sa police, sa cour, ses sponsors et amis. Il avait le vent en poupe et le marché européen comme horizon pour enfoncer Merkel et jouer à la guerre contre Poutine, Trump et Xi Jinping.

Il était Jupiter et Prométhée. Il était l’égal d’un Dieu. Il était l’élu. Brigitte lui embrassait la main.

« L’homme civilisé est celui qui se retient », aurait dit Camus d’après Google. Mais ce n’est pas la citation exacte.

On trouve la formule précise dans son roman posthume, « Le premier homme », où il évoque sans doute son père sous les traits d'Henri Cormery...

"Dans certaines circonstances, un homme doit tout se permettre et tout détruire. Mais Cormery avait crié comme pris de folie furieuse : “Non, un homme ça s’empêche. Voilà ce que c’est un homme, ou sinon…”. Et puis il s’était calmé. “Moi, avait-il dit, d’une voix sourde, je suis pauvre, je sors de l’orphelinat, on me met cet habit, on me traîne à la guerre, mais je m’empêche.” 

« Un homme, ça s’empêche… ».  Macron est sans retenue. Il n’est donc ni civilisé, ni empêché. 

Autour de lui, le troupeau qui le suit et le supporte - les Castaner, Buzyn, Ndiaye, Pénicaud, Legendre -, tous ont participé à cet affaissement que nous vivons aujourd’hui. Cette impréparation. Cet amateurisme. Cette dégringolade. Cet effondrement.

Notre société a révélé – grâce au coronavirus - sa monstruosité.

On laisse crever nos vieux. 

Plus j’y repense, plus je me remémore les images, plus les mots de Macron, son ton et son teint oranger ne passent pas. Le lapsus était terrible et révélateur dans le sous-titrage. Avec Macron et sa République en marche, on avance vers un néant que nous appellerons désormais le foutur.

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Les allocutions hebdomadaires d’Emmanuel Macron, c’est du cinéma. De la communication. Macron s’en fout des vieux qui crèvent dans les hospices. Il s’en branle du personnel soignant. Il fait semblant d’avoir de la compassion et de la considération pour eux. Il cherche à sauver sa peau. J’en suis intimement convaincu.

Sinon, il aurait agi et fait autrement. Il n’aurait pas accordé cette interview au journal Le Point. Il n’aurait pas cherché à sauver Agnès Buzyn ou à défendre l’indéfendable. C’est à dire sa politique en matière de santé publique.

Et je ne parle même pas de ce qu’il nous prépare pour la suite. L’absence de tests. Le flicage via cette appli Covid que même Orwell n’aurait pas imaginé et que Snowden décrit bien dans cet entretien sur Vice.

Pourquoi ouvre-t-il les écoles dès le 11 mai ? L’idée semble triviale : je l’énonce comme elle me vient. Il ouvre les écoles pour que les enfants des travailleurs soient gardés et pour que les prolos se remettent au boulot. Et sauvent ce qui peut encore être sauvé de l’économie.

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En Une du journal Le Monde, le 16 avril 2020.

Les enfants des classes aisées pourront rester chez eux en confinement. Voilà ce qui m’a traversé. Je peux me tromper, mais je ne crois pas.

Le coronavirus a ceci de bien qu’il nous révèle et nous pousse dans nos retranchements. On n’a vraiment pas eu de chance dans l’alignement de nos étoiles…

On comprend mieux ce qui s’est passé derrière notre dos aujourd’hui. D’abord, la Chine nous a menti et continue à nous mentir sur l’origine et l’ampleur de la pandémie. Souvenez-vous des six médecins arrêtés en décembre. C’est évident aujourd’hui.

Ensuite, l’OMS se tait et se plante lamentablement. C’est encore plus évident aujourd’hui.

L'OMS, dans les années 70, c’était 80% de financement public par les États et 20% de financement privé. Aujourd’hui, c’est l’inverse. L’OMS et ses 194 états membres et ses 7000 collaborateurs dépendent d’abord des lobbys nucléaires, agroalimentaires, bancaires et pharmaceutiques. Bill Gates, qui veut vacciner la planète, y est beaucoup plus influent que Donald Trump. Big Pharma y fait sa loi. L’OMS s’est planté dans sa gestion de la grippe H1N1, a menti sur Fukushima et Tchernobyl pour préserver les industries nucléaires japonaises et russes. Ils ont recommencé avec la Chine. 

Si nous sommes dans cette merde aujourd’hui, à compter nos morts tous les jours, si Macron – dans un premier temps - n’a rien vu venir, ce n’est pas seulement par son aveuglement et son impréparation : c’est aussi parce que l’OMS n’a pas été à la hauteur de sa tâche.

Mais ce qui était vrai en décembre, voire en janvier, ne tient plus aujourd’hui. Il a mis beaucoup trop de temps à mesurer l’ampleur et la dangerosité de la pandémie. Il aurait dû prévoir. Nous protéger, acheter des masques, des respirateurs, ouvrir des hôpitaux. C’était son job. Sa mission.

Le virus n’était pas imprévisible, comme il nous l’a répété lundi.

Tout sonne faux. Rien ne résiste à l’analyse. Macron s’est auto-proclamé chef de guerre. Depuis quand un chef de guerre est-il un observateur atterré ? 

C’est nous qui sommes atterrés, Monsieur le Président.


PS - Mon conseil confinement du jour : réécouter un vieux disque de Paolo Conte. Et revoir Gran Torino, du vieux Clint, qui repasse sur la RTBF en ce moment.

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(1) "Je pensais comme vous, Denis, il y a encore quelques jours. Malheureusement, je suis passée à une étape encore plus douloureuse … Oui je suis entièrement d'accord, c'est dégueulasse ! Inimaginable de sacrifier nos anciens ! C'est affreux et totalement surréaliste ce que je vais dire (jamais je n'aurais imaginé dire de telles choses..), mais il vaut mieux pour eux une injection de Rivotril - ou autre - plutôt que de les laisser mourir dans des souffrances terribles. Si le Rivotril (ou les anti douleurs, véto ou pas, ou les sédatifs, etc) commence à manquer comme certains médias le disent, il sera réquisitionné pour les services de réanimation et nos anciens et les malades en fin de vie crèveront dans la plus grande indignité (dans la plus grande solitude, isolés sciemment de leurs proches, en souffrant atrocement).

C'est ma plus grande crainte, qui me hante tous les jours et toutes les nuits. Ma mère de 90 ans, faute de place en EHPAD, est malheureusement à l'heure actuelle prisonnière d'une résidence séniors (les jardins d'arcadie) qui n'est pas considérée comme établissement médico social. Ce sont des bailleurs avec services.. Nuance ! Personne n'en parle ! Ils n'auront jamais de masques, jamais de tests. Pour l'ARS, les résidences séniors passeront en dernier car ce n'est pas médicalisé contrairement aux EHPAD. Et ce n'est pas la direction générale des Jardins d'Arcadie qui fournira des équipements pour les résidents ou leurs employés (malgré des bénéfices colossaux).

Les acteurs de la silver économie ne donnent pas dans l'humanisme. Qui viendra leur faire une injection ou les soulager vu que les médecins traitants n'ont toujours pas le droit de faire ça contrairement aux médecins hospitaliers et ceux en EHPAD. J'imagine facilement qu'ils ne seront certainement pas pris en charge par le samu faute de place dans les hôpitaux (!!) donc qui viendra les soigner tous ces petits vieux, qui pour leur grand malheur sont en résidence séniors et qui n'auront donc pas de médecin autorisé à soulager leurs souffrances… En ce qui me concerne, au point où on en est, je préfère qu'elle soit sédatée, euthanasiée, plutôt que de mourir dans des souffrances atroces sans que je puisse lui tenir la main, car cela me sera interdit (dixit la directrice de la résidence sénior, hier au téléphone....). Ceux que tu ne veux plus nommer, ne sont pas des incompétents mais des criminels qui n'assumeront jamais toutes leurs saloperies. Je préfère encore un produit vétérinaire que des souffrances de fin de vie (coronavirus ou pas..) pour ma mère. Je déteste ce que je dis là mais c'est aujourd'hui mon triste avis… Et je l'assume... Mast"

(2) "Bonjour. Jeudi, une résidente de la maison de retraite le Gentilé du groupe Korian rue de La Saône à Nancy a manifesté des symptômes du Covid-19. Elle a été testée dans la journée. Les résultats ont été communiqués à la directrice de la maison de retraite à 23h, cette résidente est bien positive avec des signes d’aggravation de la maladie. Cette résidente a été évacuée au CHRU de Nancy à des fins d’hospitalisation. Le lendemain, le vendredi dès 9h, la directrice prévenait toutes les familles par téléphone afin que cela soit moins anxiogène. Et rassurait.

Il faut savoir que les résidents sont confinés dans leur chambre depuis maintenant plus de quatre semaines. Que depuis plus d’un mois les visites sont interdites dans cet établissement. Ce ne peut donc être qu’un membre du personnel soignant qui véhicule le virus de chambre en chambre. Cet établissement accueille presque 200 personnes âgées, et comprend deux unités Alzheimer. Et, je ne vois pas comment une hécatombe ne sera pas en train de se mettre en marche. La directrice et le personnel sont absolument adorables et dévoués à leurs résidents, ils redoublent aujourd’hui de vigilance. La température, les gestes barrières, le nettoyage des locaux, etc… Préparation d’une sectorisation dès que tout le monde sera testé, préparation d’une recherche de personnel supplémentaire suite aux hypothétiques quarantaines des positifs.

Néanmoins après avoir prévenu dès la première heure l’agence régionale de santé, force est de constater qu’à ce jour rien n’a été fait. Le personnel, la direction, et surtout les familles de ces deux cent résidents restent totalement démunis et laissés depuis trois, et bientôt quatre longues journées sans réponse. Il semblerait que les fonctionnaires de cette émanation du ministère de la santé en région savourent en « temps de guerre » , comme le déclare à qui veut l’entendre Macron, leur week end Pascal. L’agence régionale de santé pour le moment n’a pris aucune mesure, si ce n’est de répondre que "dans les tout prochains jours » le nécessaire serait fait. Dans les tout prochains jours, cela nous amène t’il fin de semaine, quand on sait que les symptômes de difficultés respiratoire s’accélèrent chez les personnes âgées, que le nombre de lits disponibles en réanimation est très tendu dans l'est, et surtout qu’une seconde vague d’hospitalisation liée au temps estival risque d’arriver dans les dix jours à venir ?

Le manque de réactivité de cette même agence a mené au drame de Cornimont, avec 20 morts dans un petit Ehpad, avant que la responsable de l’ARS en charge de ce secteur reconnaisse du bout des lèvre « un retard à l’allumage »!! Je serais curieux de connaitre l’avis des vingt familles qui n’ont même pas pu accompagner leurs défunts concernant ces éléments de langage. Je ne vous cache pas que de nombreuses familles sont très inquiètes du manque de réactivité de l’ARS d’autant plus après le limogeage de son directeur. Très inquiètes aussi concernant le temps de latence de la direction régionale de Korian qui à ce jour, à cette heure, n’a toujours pas pris la décision de mandater un laboratoire privé. Le personnel, la directrice sont aussi dans l’attente d’une réponse. Ils vont sans doute travailler la peur au ventre, et de contaminer leurs résidents, et de rentrer contaminer leur proches.

Chaque heure compte. Et je crains que le drame survenu dans les Vosges ne serve absolument pas de leçon, et se réitère à Nancy. Si je doute de l’ARS, c’est bien parce que j’ai affaire personnellement dans l’exercice de mon métier à une émanation non pas du ministère de la santé mais du ministère de la culture en région. Devant l’incompétence, et la méconnaissance totale du terrain concernant le secteur d’activité des fonctionnaires qui le dirigent, je redoute le pire dans les jours à venir au sein de cet Ehpad où se trouvent mes parents. Bien évidemment, si quoi que ce soit arrivait de dramatique dans cet établissement, nous envisagerions une action en justice commune à la fois envers le groupe Korian, l’ARS, et le ministre de la santé et sa prédécesseur. Dans l’attente de vous lire, je reste joignable et me tiens à votre disposition. Bruno B."

Illustration de Une : Adrien Colrat - Le Média.

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