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#onbloquetout : notre édition spéciale sur ce mouvement qui fait trembler le pouvoir
Né sur les réseaux sociaux et les messageries cryptées, le mouvement Bloquons tout a fait irruption ce mercredi 10 septembre, transformant la première journée de grève et de mobilisation en véritable test de force contre le gouvernement. Dans un climat politique explosif — marqué par la chute de Macron, l’arrivée de Sébastien Lecornu à Matignon et le plan austéritaire de Bayrou —, la contestation a trouvé un écho immédiat.
Dès l’aube, des centaines de points de blocage et piquets de grève ont essaimé partout en France. À Paris, plusieurs tentatives de blocage du périphérique ont été rapidement dispersées par un dispositif policier inédit : 80 000 policiers et gendarmes, 30 hélicoptères, des drones et un usage massif de gaz lacrymogènes. La journée s’est soldée par plus de 470 interpellations, dont près de la moitié à Paris.
La jeunesse a pris une place centrale, avec des actions recensées dans 150 lycées en Île-de-France et en région, tandis que cheminots, personnels hospitaliers et raffineries ont rejoint le mouvement. De Nantes à Pau, de Tarbes à Lyon, des cortèges et piquets de grève ont rythmé la journée, parfois sous une répression brutale. Le ministère de l’Intérieur évoque 175 000 manifestants, la CGT en dénombre plus de 250 000.
Mais au-delà des chiffres, cette première journée marque l’émergence d’une dynamique populaire, spontanée et autogérée, qui rappelle par certains aspects le surgissement des Gilets Jaunes. Une AG noire de monde place des Fêtes, en fin de journée à Paris, a témoigné de l’envie de prolonger la mobilisation.
La question reste entière : comment inscrire Bloquons tout dans la durée, jusqu’à la journée du 18 septembre appelée par l’intersyndicale, et résister à une répression déjà massive qui pourrait soit étouffer, soit décupler la colère ?
Pour analyser cette première étape d’un mouvement encore en gestation, nous avons donné la parole à plusieurs invité·es : Vincent Gay, maître de conférences en sociologie à l’université Paris-Diderot, spécialiste des mouvements sociaux. Elsa Marcel, avocate et militante à Révolution Permanente. Julie Ferrua, infirmière et co-déléguée générale de l’Union Syndicale Solidaires. Aurore Koechlin, maîtresse de conférences en sociologie à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Priscillia Ludosky, figure des Gilets Jaunes. Toutes et tous ont partagé leurs analyses sur les perspectives de Bloquons tout, entre nécessité de convergence des luttes, risques d’une répression massive et espoir de voir émerger un nouveau souffle populaire.