Parce qu’il n’est plus possible que seuls “les milieux autorisés” soient autorisés à penser notre monde, ses réalités et ses combats. Cette émission se veut le carrefour des intellectuel·le·s, penseuses·eurs et actrices·eurs des luttes sociales dissident·e·s et/ou invisibilisé·e·s.
Roman nation : la fabrique des bons Français | Olivier Le Cour Grandmaison, Julien Théry
On parle beaucoup du "roman national" cultivé par une bonne partie de la droite et dénoncé par la gauche critique. Mais de quoi s'agit-il exactement ? Quand et par qui cette mythologie du passé français a-t-elle été inventée ; comment a-t-elle été imposée ? Julien Théry reçoit pour ce nouveau numéro d'OSAP, "On s'autorise à penser", l'historien et politologue Olivier Le Cour Grandmaison, auteur récemment de La Fabrique du roman nation-républicain aux éditions Amsterdam.
1870. Les troupes de Napoléon III sont défaites par les armées prussiennes ; la France perd l’Alsace et la Lorraine. 1871. Les « Rouges » triomphent à Paris. Au terme d’une nouvelle guerre civile, la Commune est écrasée. Autant d’événements dramatiques pensés par les contemporains comme des preuves de décadence. Pour arracher le pays à cette situation, il était indispensable de refaire le corps social, politique et symbolique de la nation. Les élites dirigeantes et universitaires de la Troisième République, raconte O. Le Cour Grandmaison, s’attelèrent donc à la fabrication d’un extraordinaire roman national-républicain fondé, entre autres, sur l’invention de deux mythologies : l’« universalisme » et l’« exception » française. De là, aussi, la construction d’un puissant État éducateur et moralisateur, notamment voué à la domestication des classes « dangereuses ». Aujourd’hui encore, des politiques, des historien·nes, des philosophes et des essayistes continuent d’exalter cette France fantasmée pour mieux occulter nombre de maux réels.