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GAFAM : quand les géants étasuniens infiltrent l’État français

Par Timothée de Rauglaudre et Maïlys Khider

Retrouvez les contenus de ces auteurs : page de Timothée de Rauglaudre et page de Maïlys Khider.

Derrière les grands discours du gouvernement contre les GAFAM, la frontière entre l’État et les géants du numérique devient de plus en plus poreuse. Les pantouflages et le copinage sont devenus monnaie courante. La France est-elle devenue un « État plateforme » ? Le Média a enquêté.

L’ère de l’impunité pour les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) est-elle terminée ? Depuis trop longtemps, ces cinq géants du numérique refusent de payer leurs impôts en Europe, marchandisent nos données, polluent la planète à l’envi, pénètrent les domaines de la santé, de l’éducation, des médias ou de l’armée. Dans un récent entretien au Point, Emmanuel Macron affichait une fermeté sans précédent. “La société qui se dessine n’est pas toujours démocratique (...) Il ne faudra pas exclure un démantèlement si cela se révélait nécessaire”. Puisque "les sociétés démocratiques ne peuvent accepter que des plateformes soient en situation de monopole”, il se disait “favorable à ce que les régulateurs européens de la concurrence se réarment face à ce risque". Mais derrière ces grands discours, l’État français entretient des relations bien plus poreuses, à la limite de la connivence avec les GAFAM.

GAFAM : quand les géants étasuniens infiltrent l’État français
Les GAFAM, des géants du numérique qui écrasent tout, y compris leurs concurrents chinois

Ces relations privilégiées passent d’abord par des allers-retours entre la haute fonction publique et des postes-clés au sein de ces entreprises. Pantouflages et rétro-pantouflages (“revolving doors”) avec les GAFAM deviennent depuis quelques années monnaie courante. Ancien membre de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep), Benoît Loutrel a été débauché par Google en 2017. Il est devenu directeur des politiques publiques et des relations avec les gouvernements. En d’autres termes, un lobbyiste. “Par opportunité, j’ai rejoint Google France. (…) J'avais la conviction qu'ils devaient être régulés”, déclare-t-il en audition à l’Assemblée nationale. Cela n’aura pas duré : “J'y suis resté neuf mois, ce qui est court, parce qu'il est apparu assez vite qu’ils n'avaient pas en fait la volonté d'être des acteurs proactifs de la mise en place de cette régulation”.

En 2019, après avoir défendu les intérêts de Google, il revient au bercail. Il publie un rapport sur la régulation des plateformes numériques, commandé par Cédric O, ancien secrétaire d'Etat au numérique. On peut y lire que “la démarche actuelle d’autorégulation des réseaux sociaux est intéressante en ce qu’elle démontre que les plateformes peuvent faire partie de la solution aux problèmes constatés. Elles ont inventé des réponses variées et agiles” ou encore que “dans le cas de Facebook, la mission a pu constater que la plateforme s’est dotée de mécanismes d’autorégulation grâce à des moyens dédiés croissants”. La même année, Facebook est condamné à payer 5 milliards de dollars d’amende par l’autorité de régulation étasunienne pour une fuite massive de données, un an après le scandale Cambridge Analytica. Ironiquement, Benoît Loutrel est aujourd’hui membre de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).

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