Le Cameroun est un pays dont on parle peu dans les médias internationaux. Une sorte de nation immobile, dirigée depuis bientôt 43 ans par le même homme, Paul Biya, qui était déjà dans les arcanes du pouvoir dans la foulée des indépendances. Le pays où est né la Françafrique, selon les historiens. Puisque c’est ici que le pouvoir gaulliste a orchestré pour la première fois, à partir de la fin des années 1950, un jeu de passe-passe consistant à « partir pour mieux rester », à mettre au pouvoir ses obligés pour mieux réprimer les vrais indépendantistes, dans le cadre d’une guerre civile indirectement pilotée depuis Paris mais qu’on ne peut pas directement lui imputer. Samuel Eto'o est entré dans l’Histoire en tapant dans un ballon de football. L’ancien buteur du FC Barcelone, ex-capitaine des Lions indomptables, est désormais l’homme à abattre pour une grande partie du sérail de son pays. Président de la Fédération camerounaise de football, il fait converger les regards du monde entier sur une drôle de bataille qui secoue son pays. Il clive, polarise, est adulé autant que haï. Et une question se pose désormais : veut-il être calife à la place du calife ? Ou plus précisément : veut-il être calife après le calife ? Son histoire est en tout cas très instructive sur les nouvelles figures du politique, dans une Afrique francophone en partie verrouillée depuis des décennies, où la population est à la fois jeune, déshéritée et habitée par un ressentiment immense.