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ADP : le scandale qui remet en cause la privatisation

Ce mercredi 12 février, le Média réunissait un syndicaliste d’ADP, un député insoumis et une élue socialiste de la Région Île-de-France autour des révélations de l’enquête de Marc Endeweld au sujet d’une filiale du groupe ADP. Caisse noire, corruption et argent libyen viennent jeter le doute sur le groupe au cœur du projet de privatisation du gouvernement.

Dans le dossier de la privatisation d’Aéroports de Paris (ADP), rien ne va. Aberration économique, écologique, perte d’un monopole stratégique pour la France : le projet fait face à de nombreuses critiques argumentées. Une procédure pétitionnaire visant à ouvrir un référendum d’initiative partagée (RIP), soutenue par l’opposition de gauche et de droite, a été lancée pour la première fois en France. Elle doit réunir 4,7 millions de signatures pour ouvrir la voie au RIP en question. La procédure en ligne est ouverte jusqu’à mi-mars 2020, mais elle n'a pour l'heure récolté qu’un peu plus d’1 million de signatures.

C’est dans ce contexte que nous publions une enquête sur les agissements de l'une des filiales internationales du groupe. ADP Ingénierie (ADPI) est soupçonné d’avoir remporté dans des conditions troubles des chantiers pharaoniques d’aéroports en Libye. Corruption, surfacturation, commissions suspectes : l’imbroglio est total et l’hypothèse d’une ouverture d’information judiciaire pourrait considérablement ralentir le processus de privatisation du groupe.

Exclusif - Une caisse noire et un parfum de corruption remettent en cause la privatisation d'ADP
En janvier 2019, la police a perquisitionné le domicile de l’ancien PDG d’une filiale d’ADP. Le début d’un scandale de…

Isabelle This Saint-Jean, économiste et secrétaire nationale du Parti socialiste rappelle que cette affaire éclate alors que le gouvernement tente de faire passer en force un projet absurde. “On ne peut pas justifier cette privatisation. C’est absolument incompréhensible, d’un point de vue purement économique. Chaque année, l’État récupère 200 millions de dividendes d’ADP. Et là, l’idée, c’est de vendre avec l’espoir de toucher 10 milliards et de les placer dans un fonds pour financer l’innovation. On estime que les dividendes de ce fonds ne seront pas supérieures aux dividendes actuelles. Économiquement, où est l’intérêt ?”.

Un projet si aberrant qu’il rappelle la privatisation des autoroutes en 2005, qui apparaît aujourd’hui comme un cadeau fait aux grandes entreprises privées et un racket organisé. Eric Coquerel, député France Insoumise de la 1ère circonscription de Seine-Seine-Denis va même plus loin pour tenter d’expliquer l’obstination du pouvoir : “Il peut y avoir le côté idéologique, enfin, ça explique seulement une partie. Je forme l’hypothèse qu’il y a un deal caché, peut-être avec Vinci, pour les dédommager de l’annulation de Notre-Dame-des-Landes, par exemple”.

ADPI, la filiale boulet d’ADP

De fait, le fonctionnement opaque d’ADPI semble être une épée de Damoclès prête à retomber sur le projet de cession d’ADP. Le gouvernement entend vendre ses parts à des investisseurs privés. Il faut donc que le groupe soit attractif, et pas gangrené de l’intérieur. “Le gouvernement est tout à fait conscient du sujet. Un cabinet a été mandaté pour enquêter sur le risque juridique lié à ADPI. Ces casseroles du passé ont été prises en compte en apparence. Mais s’il y a ouverture d’une information judiciaire, il pourrait avoir des mises en examen de politiques. Cela ne pourra plus être réglé par le parquet national financier à l’amiable. C’est pour ça qu’il fallait rendre publiques ces informations”, explique Marc Endeweld.

Le possible scandale autour d’ADPI illustre l’importance du secteur du transport aérien qu’il ne faut surtout pas laisser entre les mains du privé, d’un point de vue économique, stratégique et écologique. Pour Daniel Bertone, secrétaire général de la CGT d’Aéroports de Paris, cette dernière dimension ne doit pas être laissée de côté. “Peut-être qu’un jour, si on considère que le transport aérien doit participer à l’effort pour diminuer les émission de gaz à effet de serre, on prendra des mesures pour limiter le trafic aérien. Si à ce moment-là, c’est dans le privé, il faudra dédommager l’exploitant qui va racheter ADP. Que ce soit Vinci ou un autre, il sera en position de force vis-à-vis de l’Etat”.

Dans l’affaire libyenne, dans la politique forcenée du gouvernement,une logique unique est à l'oeuvre : celle du marché. “Dès qu’une entreprise publique se fait coter en bourse, le ver est déjà dans le fruit, avant même la privatisation. ADP est une entreprise qui marche déjà comme une entreprise capitaliste. Cette nouvelle affaire montre cela. Cette entreprise se comporte à l’étranger non pas comme une entreprise française qui pourrait faire de la coopération pour construire des aéroports mais en suivant d’autres logiques, de marché, de rentabilité, voire peut-être crapuleuses”, s’alarme Eric Coquerel.

Malgré nos révélations et l’opposition à la privatisation d’une majorité de Français, le processus d’ADP suit son cours. La crainte de voir le référendum d’initiative partagée arriver à son terme semble éloignée. Reste le spectre du scandale en gestation. Le parquet de Paris bloque pour l’instant l’ouverture d’une information. Mais d’autres révélations pourraient ouvrir la boîte à Pandore et mettre sérieusement en cause la privatisation. Comme l’ont soufflé plusieurs invités de notre émission, l’affaire ADP, à ses prémices, a de curieuses ressemblances avec une autre vieille affaire qui a mis du temps à sortir : Elf... 

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